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La fin des héros

Ils sont épuisés. Vieillissants. Malades, ou infirmes. N'ont plus le goût à rien. Patientent sans agir, le regard vide et désabusé. Par un ne saurait relever l'autre et d'ailleurs, pas un ne le souhaite vraiment. Leur combat est terminé : rangé au fond du placard.


Eux, ce sont nos héros d'hier. Ceux qui portaient des valeurs dans lesquelles plus personne ne se retrouve aujourd'hui. Nous les avons délaissés à force de grandir et de poser un nouveau regard sur le monde.


Nous ne cherchons plus de messie à collants bleus. Nous n'espérons plus l'intervention d'un être suprême capable à lui seul de changer la face du monde. Nous ne voulons plus croire, crédules, aux grands sermons d'un bien plus puissant que le mal. Non pas que nous soyons désabusé·es : bien au contraire. Nous savons plus que jamais notre force. La notre. Celle qui peut éclore à chaque instant, à chaque pensée, à chaque geste.


A mesure que les imprévus s'abattent sur nos trajectoires, nous prenons conscience de notre vulnérabilité et, au même instant, de notre véritable pouvoir. Savoir notre fragilité signifie savoir qu'il faut prendre soin : de nous, de l'autre, du monde. Personne ne pourra nous sauver et c'est tant mieux : en laissant mourir nos super-héros, nous donnons naissance à nous-mêmes.


Gilles Barbier, L'Hospice






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