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Semer ce qu'on oubliera

Création // Performance, texte.



Début de la performance. Je sors dans la rue avec un sac plein de sable. Je me promène comme je le fais toujours, sans réflechir à mon trajet. De ma main, le sable s'écoule, laissant une trace éphémère du chemin que j'emprunte.


Tout en marchant je me dis, ne te retourne pas. Je me dis, avance et ne te retourne pas. Je me dis, laisse derrière toi ce qui ne t'a pas plu, laisse filer les chagrins, les regrets, les peurs, les colères, les ratés. La vie est trop garce pour ruminer tout ce qu'on aurait dû, pu, voulu.


Et je regarde droit devant moi, vers le soleil. Il m'éblouit, je ne vois pas grand chose. J'avance tout de même. Je fais confiance à mes pas, à leurs besoins de me mener quelque part. Et plus j'avance, plus je m'étonne de reconnaître la forme du sentier, la couleur du ciel, l'horizon qui s'étend. Plus j'avance, plus il me semble avoir toujours été ici. Toujours au même endroit.



Alors je pense à ma mère. Quand j'étais petite elle disait, la vie est une spirale. Pas une boucle qui tourne en rond, non. Une spirale.Et je regarde à nouveau le monde qui m'entoure. Je me concentre sur le bruissement inconnu des feuilles, les nouvelles fleurs qui ont poussées, la forme des nuages qui a changée, les arômes, les parfums, les reflets. Je me concentre sur ces petites choses qu'on ne voit pas au premier coup d'œil. L'invisible qui délivre le visible.Et je comprends qu'elle a raison, ma mère. La vie est une spirale. Chaque minute, chaque jour, chaque année, un peu plus grande, un peu plus haute, un peu plus dense.


Alors, un instant seulement, je me retourne. Juste pour voir le passé s'évanouir derrière moi. Et puis je me remets en route, et j'avance. Jusqu'à ce que le soleil m'éblouisse à nouveau et que mon sac de sable soit vide. Plus de trace. Fin de la performance.


Cette performance dure le temps que mon sac soit vide. La première réalisation a été filmée en 2006 par Michaël Jourdet.





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